Deux volumes avec des manques de cuirs:
A priori décoller le dos, et reposer ensuite sur le nouveau dos en cuir ne devait pas poser de problème.
C'était sans compter sur la fragilité du cuir collé avec une colle très dure et très cuite sur la moitié du dos.
Avançant tout de même, parce que déjà bien entamé, je n'ai pu reussir à garder intacte la dorure, entiers les caissons.
Trop de confiance en soi nuit.
Soit je refaisais faire un dos à la dorure à l'identique, dépareillant les 35 volumes.
Soit je n'y touchais pas.
Il faut donc remonter ce dos avec le poids de l'échec, en faisant du mieux possible.
En sachant qu'on ne fait pas de miracles. J'appelle tout de suite le propiétaire des livres, qui compréhensif, s'excuse presque de m'avoir confié un livre en si mauvais état.
Quelques reprises de dorure avec les moyens que j'ai, le rende présentable.
Sa solidité est assurée par le dos en cuir refait.
Les tranchefiles tiennent le corps d'ouvrage qui s'était déformé avec le temps et les mauvaises manipulations, mauvais stockages.
Des traces de mouillures, un cuir aussi sec a subi la chaleur de trop près, l'eau.
La coiffe et la tranchefile arrachées ne tenaient plus le corps d'ouvrage très peu apprêté.
Il est reparti pour quelques années chez un passionné des livres, érudit du commerce au 18ème siècle, passionnant à écouter.
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Si je décide de montrer les reussites comme les échecs de mon travail ou ce que je considère comme un échec, c'est pour casser le mythe de l'artisan doué par nature qui, tel un magicien, redonne une vie aux livres.
On pouvait faire appel à la feuille d'or à Paris mais pour quel prix?
Le projet de départ que j'ai mal évalué est la raison de ce sentiment d'echec que j'ai.
Personne n'y échappe surtout en matière de restauration.
Respecter le travail qui a été fait sur ces livres qui ne sont que des objets de travail en premier, qui sont devenus des objets marchands ensuite auréolés d'une espèce de magie construite par des marchands et des financiers, est toujours le premier point.
Quand on ne peut pas sauver un dos ... on ne peut pas.
Aussi, je m'adresse aux jeunes relieurs débutants, une clientèle arrive avec toute sorte de livres de qualités toutes différentes qu'il faut traiter en fonction de ce que vous savez sur le moment, puis ce que vous avez à disposition dans votre atelier.
Il faut y mettre des moyens et c'est assez difficile en 2025.
Parce que les doreurs se trouvent dans les villes, que les délais sont toujours très longs chez le relieur déjà, la dorure est aussi chère que la reliure. Que nos métiers résistent mal à l'absence de formation longue en reliure.
Cinq ans d'apprentissage diminuant à 3 puis 6 mois puis 15 jours puis une option....
Certains livres ne resteront pas mais d'autres, oui et c'est le relieur qui doit sentir et savoir que faire sur les livres qu'on lui apporte.
A trop donner le pouvoir à l'argent qui permet d'acheter, le relieur est tombé dans une espèce d'espace inaudible.
Quand il ne peut plus faire son travail, alors il est mauvais ... puis à force de communication, il revient.
Et ainsi, le problème de la confiance est un enjeu primordial.
Sans confiance, on ne peut rien faire...
Dans tous ces cas là, je sentais les matériaux. Il a fallu beaucoup de recul pour imaginer le déroulement de la restauration.
Un manque de recul et des harcèlements incessants dans ce monde agité qui isole les personnes, sont autant de freins pour les artisans que nous sommes.
Ne pas se décourager.
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